Communiqué de presse

Discours de Jean-Luc Gleyze - Conférence de presse de rentrée de septembre 2023

Je ne peux m’empêcher de débuter cette conférence de presse sans une pensée émue pour toutes les populations des régions dévastées récemment par des évènements climatiques, environnementaux ou des désastres qui ont essaimé notre été : le Canada, la Grèce, le Maroc et tout récemment la Libye.

Je proposerai à l’assemblée départementale de s’inscrire dans la meilleure marque de soutien financier que nous puissions avoir.

Permettez-moi de vous conter mon expérience personnelle, en ouverture, pour illustrer mon propos.

J'étais, la semaine dernière, au Conseil d’État pour apporter mon soutien et mon expérience de Président de collectivité à une famille girondine qui se bat depuis des mois afin que l'un de leurs fils soit enfin accueilli en IME. Un droit ouvert par la Maison départementale des personnes en situation de handicap et non mis en œuvre par l'Agence régionale de santé du fait du « scandaleux manque de places dans le médico-social dans ce pays ».

A travers ce cas particulier c'est pour des centaines de famille girondines que j'étais présent : les parents ne peuvent plus être laissés seuls face à ce désengagement de l'Etat. J'alerte, depuis longtemps, sur les conséquences délétères de ce manque structurel de places sur la protection de l'enfance : il est intolérable que les enfants finissent confiés à l'ASE faute d'étayage en amont, au domicile, à l'école ou en institution. Les enfants sont les premières victimes du délitement de nos services publics.

Ce délitement est généralisé, ici à l’école, là en milieu hospitalier, ailleurs dans les services publics en milieu rural.

Vous connaissez toutes et tous mon attachement à la défense de ces services publics qui sont le patrimoine de celles et ceux qui n’en ont pas. Et pour les plus vulnérabilisés, c’est une double peine.

La situation est catastrophique : les tarifs de l'électricité ont augmenté de 10 % le 1er août dernier. Les prix des fruits et légumes ont augmenté de 16% en un an selon Familles Rurales ; l’inflation galopante due à un contexte économique difficile, mais aussi à l’enrichissement de certains, pousse des familles entières, des travailleurs, des retraités, des étudiants, toujours plus nombreux, vers les associations d’aide alimentaire. Qui, à leur tour, poussent un cri d’alarme terrifiant.

Le secteur de la santé est aussi gravement atteint, alors que selon l’Ifop, 83% des Français estiment que la santé est une priorité absolue.

C’est pourquoi, il y a quelques semaines encore, j’ai dû, avec mes collègues, interpeller le DGARS au sujet des annonces de fermeture d’un pavillon psychiatrique de l’UMD du CH de Cadillac ainsi que de la Clinique des Gravières.

Nous connaissons les mêmes difficultés dans le secteur de la Protection de l’Enfance sur le volet pédopsychiatrique, comme j’en ai fait l’alerte avec des collègues présidents de département dans une tribune au Monde, en début d’année.

Plus récemment, nous avons interpellé la Ministre chargée de l’Enfance pour lui demander de convoquer des Etats Généraux de la Protection de l’Enfance, dans un contexte de désengagement structurel des services de l'Etat (santé, médico-social, justice) et de limitation des moyens RH et financiers. Tous les acteurs de terrain en témoignent, nos agents y compris, il y a urgence à réagir. 

Mais je pourrais aussi très bien évoquer la situation inquiétante des CH de de Sainte Foy, de Langon, de Charles Perrens…

Ces tensions chroniques du système hospitalier révèlent un véritable problème structurel : c’est le manque de psychiatres et plus largement de professionnels de santé et de soin.

Résultat, faute de praticiens, même les établissements de bonne volonté ne peuvent plus garder ouvertes leurs unités.

Nous sortirons de cette situation systémique en donnant plus de moyens aux métiers du lien et de la santé. Il faut plus de service public, non pas des « économies d’échelle » ou pire, offrir des pans entiers de notre état social à un secteur lucratif incapable de veiller sur les plus vulnérabilisés. Est-il besoin de vous citer l’affaire Orpéa, et tout récemment les révélations dans le secteur de la petite enfance ?

Les deux livres-enquêtes (Babyzness et Le prix du berceau) qui viennent de paraître, démontrent bien qu’au-delà des difficultés qui touchent l’ensemble des secteurs de prise en charge des personnes vulnérabilisées, une réelle différence existe entre les pratiques en cours dans le secteur public, et les dérives propres au secteur privé, amenées par une course à la rentabilité qui ne peut que nous glacer.

Pourquoi ? Parce que la montée des inégalités, les crises écologiques et leurs conséquences sur les ressources et les déplacements de populations conduisent à une multiplication et à une banalisation des atteintes à la dignité que seul le service public est en mesure d’atténuer.

Les professeurs, les soignants, les magistrats, les travailleurs du lien, les garants de la sureté publique sont nombreux à dire « ne plus pouvoir faire leur métier dignement ».

C'est le sens de la démarche portée au sein du Haut Conseil au Travail Social dont je suis devenu vice-président cette année. J'ai pris ce nouvel engagement avec la conviction que notre société ne peut plus délaisser les travailleurs sociaux, ou devrais-je dire travailleuses sociales, qui sont finalement les premiers pourvoyeurs de soin et de dignité. Et ils sont nombreux : auxiliaires de vie, éducateur spé, assistants sociaux, famille d'accueil, etc. On ne peut plus accepter que nos institutions soient des fabriques d'indignité pour les personnes accompagnées et les travailleurs eux-mêmes. Un sursaut national pour la considération et la revalorisation effective de ces métiers est une urgence : les travaux du livre blanc qui seront dévoilés prochainement doivent y apporter des réponses concrètes.

Si la devise « liberté, égalité, fraternité » sonne bien creux pour des millions de femmes, d’enfants, d’hommes.

Et ce n’est pas « la faute aux services publics », aux « fonctionnaires », mais bien au manque voire à la disparition de ces piliers de la dignité dans notre démocratie sociale.

La cause est plutôt à chercher dans le démantèlement méticuleux du bon fonctionnement de nos services publics depuis la fin du XXème siècle.

Un démantèlement qui trouve son écho dans la lente asphyxie des collectivités territoriales par privation d’autonomie fiscale.

Mais il faut aussi voir les velléités plus récentes comme la loi « asile et l’immigration » ou pour le « plein emploi » et le conditionnement du RSA, sans parler de la réforme des retraites officiellement en vigueur depuis le vendredi 1er septembre.

Nous le constatons dans les faits : ces lois fracturent chaque jour un peu plus la cohésion nationale et accentuent la précarisation et sont déconnectées des récentes revendications populaires :

Lors du mouvement des Gilets jaunes, après de nombreux mouvements sociaux de contestation dont le dernier en date est celui des retraites, après le rappel des tensions chroniques dans les cités qu’ont fait éclater les « émeutes » …

Nous devons démontrer qu’une autre voie est possible, et cela ne pourra pas se faire dans la verticalité.

Si le scrutin électoral confère aux élus un mandat pour agir pour une durée déterminée, la légitimité de l’action publique nécessite aujourd’hui d’aller plus loin. La démocratie s’entretient, se nourrit, se fait vivre.

L’élection, si elle est nécessaire, n’est pas suffisante pour qu’une gouvernance et des politiques publiques soient jugées démocratiques et justes.

La voie que nous proposons donc en Gironde, c’est celle de l’opportunité donnée à toutes et tous d’avoir accès à des outils communs

Je vous en présenterai aujourd’hui deux : le Budget Participatif et le tout nouveau Droit d’Interpellation Local & Citoyen.

Et quel meilleur lieu pour en parler qu’ici, à Léognan, au cœur de ce jardin-forêt.

Ce projet est une de ces belles réalisations citoyennes que le premier Budget Participatif a permis de concrétiser, démontrant qu’un dispositif de participation citoyenne permet de réellement changer la vie quotidienne.

Ce jardin-forêt, qui n’aurait pas vu le jour sans le budget participatif du Département, est nourricier dans tous les sens du terme :

  • C’est un espace de sensibilisation à la biodiversité,
  • De partage des pratiques écologiques
  • Et à terme de production alimentaire locale.

C’est le fruit de l’imagination et de l’engagement continu d’une association « Les Racines de Pontaulic » et d’élus de terrain comme Corinne Martinez que je remercie de s’être particulièrement impliquée.

Je pourrais aussi citer d’autres réussites du premier Budget Participatif :

  • L’espace pour enfants pour faciliter l’inclusion des migrants et demandeurs d’asile à Artigues-près-Bordeaux ;
  • L’ouverture de bureaux participatifs pour les travailleurs itinérants mis à disposition gratuitement à Saint-Symphorien ;
  • La bricothèque gratuite au sein de La Boucle à Bègles, permettant le prêt d’outils de bricolage et de jardinage.

C’est aussi ça, le service public : faire vivre des lieux de lien, mettre à disposition de toutes et tous des biens communs.

Ce que cela signifie, c’est que les élus du Département de la Gironde n’ont pas prétendu « mieux savoir » ce qui était bon pour leur territoire, ils ont fait avec pour être au plus près des besoins.

C’est aussi la preuve qu’en tant qu’élus, nous avons tout intérêt à développer la coopération avec les réseaux citoyens, à faire plus et mieux avec nos associations partenaires…

Parce que c’est ensemble que nous prenons bien soin de nos quartiers, nos villages et finalement de la qualité de notre démocratie.

Le renouvellement du Budget Participatif conduit par Céline Goeury et porté par les élus du Département de la Gironde.

Assumer, dans un contexte de tension budgétaire, de maintenir notre Budget Participatif peut surprendre.  Pourtant, c’est bien la situation qui le rend plus que jamais pertinent.

C’est précisément lorsque nous traversons des épreuves que personne ne doit être laissé sur le bord du chemin dans la pauvreté avec ou sans enfant, personne ne doit se retrouver isolé dans une situation d’aidant ; personne ne doit se sentir marginalisé par un manque d’équipement public dans son village, son quartier…

Il nous faut donc trouver des outils pour donner sens à l’action collective et des lieux pour ne pas faire face seul mais ensemble.

C’est précisément ce que nous tentons de faire avec l’expérimentation d’une Sécurité Sociale de l’Alimentation en Gironde.

J’appelle donc les Girondines et les Girondins à être nombreux à proposer leurs projets du 1er septembre au 31 octobre, autour de deux axes fondamentaux pour notre présent et notre avenir, à savoir :

La stratégie départementale de résilience territoriale : anticipation et adaptation aux changements environnementaux et sociétaux, afin d’entraîner une transformation des habitudes des habitantes et habitants de la Gironde ;

La Grande Cause départementale : la jeunesse, leur implication et le soutien de leurs initiatives ; et dans ce cadre, une partie du budget sera spécifiquement réservée aux projets déposés par des jeunes de 11 à 25 ans.

Les 800 000 euros consacrés à la réalisation de projets proposés et votés par les girondines et girondins de 11 ans et plus, sont donc plus qu’une enveloppe :

C’est une action commune au service de la transformation de notre territoire vers des modes de vie solidaires, résilients et porteurs de sens.

C’est aussi pour continuer ce travail d’attention à l’expression citoyenne des politiques publiques nécessaires pour leur territoire, que nous avons mis en place un nouveau pilier d’une « démocratie girondine ouverte » : le Droit d’interpellation locale.

Ce droit d’interpellation, inspiré des revendications des Gilets jaunes pour le « RIC » (référendum d’initiative citoyenne), a été co-construit, en 2022 et 2023, avec des girondines et girondins qui ont fixé les critères de recevabilité des interpellations et le fonctionnement des différentes étapes de ce nouveau dispositif, afin qu’il soit une véritable action politique de nature pratique, dont le résultat pourra être tangible à court ou moyen terme. 

C’est d’une part la reconnaissance du caractère fécond de l’expertise d’usage et de l’expérience des professionnels du Département au contact des Girondin.e.s ;

Et d’autre part, la traduction institutionnelle de notre conviction que tout citoyen, sans distinction, a le droit, de contribuer de façon active à la définition de ce qui relève de l’intérêt commun et à prendre part à l’activité de décision qui la traduit en politiques publiques.

Loin d’être un « gadget », c’est un moyen de saisir les occasions de développer nos services publics.

Car qui est mieux placé pour concevoir le juste accompagnement professionnel que l’allocataire du RSA ?

Qui est plus pertinent qu’une personne en situation de handicap pour simplifier des dossiers MDPH ?

Alors que l’Etat s’entête à négliger les mouvements sociaux quoi qu’il en coûte à la démocratie, le Département de la Gironde lui, partage la question démocratique et fait confiance en ses habitants.

Cette pertinence de l’action « d’ici d’en bas », cette résilience qui vient des territoires bat en brèche les reproches faits par l’Etat aux collectivités locales et le mépris de la légitimité populaire à agir dans la vie commune.

Ici et maintenant, nous ouvrons donc la voie d’une démocratie girondine tournée vers la fabrique continue de l’inclusivité, du prendre soin, de la solidarité et tendre vers le bonheur – bref, la fabrique d’une Gironde en commun, portée par toutes et tous, partout !

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